THIERRY VILLENEUVE

Le 23 Février 2009, au petit matin, après une nuit passée auprès d’elle à l’accompagner vers la mort, nous demandions mon frère et moi à voir le médecin de garde afin qu’ils arrêtent les différentes machines qui tenaient artificiellement en vie notre mère.

Ainsi dans l’heure qui suivait, Pierre son compagnon, Patrick, Anne notre sœur, et moi assistions à son dernier souffle.

Comme je le fais depuis des années déjà, parce que la mort est une question qui, comme beaucoup, me taraude, à l’abri des regards je filmais le corps de ma mère, mais contrairement aux expériences précédentes, pour différentes raisons d’une banalité quotidienne, je n’avais sous la main que mon ordinateur portable, c’est donc avec cet objet que je la filmais, la veille de l’enterrement.

A partir de ce jour, durant une année exactement, je n’ai cessé de filmer avec la webcam de  mon ordinateur, cette période étrange, douloureuse et tout à la fois lumineuse, qu’est le deuil.

Filmant le quotidien, les trajets, les rendez vous, la nature et la ville, le jour comme la nuit, des moments forts et étranges comme le jour où, avec ma sœur, sous le regard hagard de Pierre, nous avons trié et vidé ses affaires pour n’en citer qu’un.

De ces images, j’ai tiré un objet que je ne saurais nommer autrement qu’un journal de deuil.